La soirée organisée au CCF (Centre Culturel Français de Bamako) a permis à nombre d’intellectuels africains d’exprimer leur solidarité envers ce pays frappé par un violent séisme
La 2è édition de la Rentrée littéraire bat son plein. Le patio du Centre culturel français a ainsi abrité mercredi une soirée de lecture et poésie présentée et animée par Valérie Marin-La-Meslée et Issoufi Bedari Touré. Cette soirée, entrecoupée d’intermèdes musicaux, a offert l’occasion à des auteurs comme Gabriel Okoudji, Ousmane Albakaye Kounta, Ismaïla Samba Traoré, Boubacar Belco Diallo, Muntaga Fane et Hamidou Magassa de lire des passages de leurs œuvres ainsi que des extraits de celles des auteurs invités à la rentrée littéraire.
Cette soirée a été également l’occasion pour les écrivains de rendre hommage à Haïti en présentant des écrits d’auteurs de ce pays phare de la littérature francophone. On se rappelle qu’un tremblement de terre a frappé, le 12 janvier, Haïti. Cette catastrophe majeure dans l’histoire de l’humanité a, fait selon un bilan non encore définitif, 70 000 morts, un million de sinistrés, des dégâts matériels incommensurables.
Valérie Marin-La-Meslée a présenté cette veillée pour Haïti comme une participation des écrivains à la chaîne de solidarité créée autour de ce pays sinistré. La soirée a permis de souligner encore une fois que par delà les océans, un lien humain et spirituel rapproche l’Afrique de l’ancienne « Perle des Antilles ». Haïti, la terre la plus africaine des Grandes Antilles, a depuis le temps des indépendances africaines, notablement œuvré pour le continent.
Surtout pour l’actuelle RD Congo, qui, dès juillet 1960, s’est trouvée démunie après le départ massif des cadres belges. Selon Kettly Noël, une danseuse haïtienne résidant à Bamako, des liens historiques forts existent entre les peuples de ces deux parties du monde. Des liens comme le vaudou. L’évocation de cette religion, a-t-elle expliqué, fait penser, pour ceux qui en savent quelque chose, à Haïti et au Bénin. Deux pays situés pourtant sur deux continents différents.
En fait, la pratique par ces peuples différents du vaudou est l’une des preuves de la relation qui existe entre l’Afrique et Haïti depuis des siècles. Et l’héritage africain est resté très présent dans la vie d’Haïti qui, en arrachant son indépendance en 1804, est devenue la première République noire. L’essentiel de la population haïtienne est en effet constitué de descendants d’esclaves venus de la côte ouest de l’Afrique, ce qui explique les liens entre ces populations et celles qui vivent aujourd’hui au Bénin, au Nigeria ou au Togo.
Le peuple haïtien n’a d’ailleurs eu de cesse, tout au long de son histoire, de revendiquer ses racines africaines. Cette soirée a été l’occasion pour nombre d’intellectuels africains d’exprimer leur solidarité envers Haïti. C’est le cas notamment de l’écrivain congolais Alain Mabanckou qui a eu ses paroles fortes : « maintenant que les Africains ressuscitent tous en Haïti. Parce que, même lorsque nous aurons tout perdu notre corps et notre âme, il y aura toujours en Haïti les vestiges de notre “africanité ”.
Et c’est en cela que le séisme qui s’est abattu dans ce pays-là, a frappé en fait l’Afrique en plein cœur ». La soirée a également organisé un chassé-croisé entre les poètes maliens et haïtiens. Plusieurs oeuvres de poètes haïtiens comme "Le mur du son" de René Depestre, "La ballade du léopard" de Jacques Stéphan Alexis, "Larme" de Magloire Saint Aude, "Élégie de décembre" de René Philoctère, entre autres, ont été lues.
Une chanson qui retrace la tragédie du roi Christophe chantée par James Germain un artiste haïtien, a mis un point final à la soirée. Une première soirée avait eu lieu mardi au San-Toro, toujours dans le cadre de la rentrée littéraire. Elle a rendu hommage à des auteurs disparus, d’Ahmed Baba (15è siècle) à Pascal Baba Coulibaly (décédé en juillet 2008). Au menu de cette soirée figuraient témoignages, lectures et musique instrumentale.
par Mariam A. Traoré
L'Essor 12/02/2010
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