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Haïti dans le monde

Rapport sur la réunion préparatoire à la constitution d’un comité international de coordination (CIC) pour la culture Haïtienne

A cette réunion ont participé une importante délégation haïtienne composée de : Mme Marie-Laurence JOCELYN LASSEGUE, Ministre de la culture et de la communication ; Mme Magali COMEAU DENIS, Conseillère spéciale auprès de la Ministre et ancienne Ministre de la culture et de la communication ; M. Daniel ELIE, Directeur de l'Institut de sauvegarde du Patrimoine national (ISPAN) et ancien Ministre de la culture et de la communication ; M. Wilhems EDOUARD, Directeur des Presses nationales d'Haïti ; M. Pierre BUTEAU, sociologue, historien et ancien Ministre de l'éducation nationale ; Mme Marie-Denis JEAN, Déléguée permanente adjointe, Chargée d’affaires, Délégation permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO et M. Kerby LACARRIERE, Ministre conseiller, Délégation permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO



Mardi 16 février 2010, Siège de l’UNESCO (Paris), Salle XI RAPPORT FINAL I. Introduction 1. La réunion préparatoire à la constitution d’un Comité international de coordination (CIC) pour la culture haïtienne (ci-après «la Réunion») s’est tenue à Paris le 16 février 2010. A cette réunion ont participé une importante délégation haïtienne composée de : Mme Marie-Laurence JOCELYN LASSEGUE, Ministre de la culture et de la communication ; Mme Magali COMEAU DENIS, Conseillère spéciale auprès de la Ministre et ancienne Ministre de la culture et de la communication ; M. Daniel ELIE, Directeur de l'Institut de sauvegarde du Patrimoine national (ISPAN) et ancien Ministre de la culture et de la communication ; M. Wilhems EDOUARD, Directeur des Presses nationales d'Haïti ; M. Pierre BUTEAU, sociologue, historien et ancien Ministre de l'éducation nationale ; Mme Marie-Denis JEAN, Déléguée permanente adjointe, Chargée d’affaires, Délégation permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO et M. Kerby LACARRIERE, Ministre conseiller, Délégation permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO 2. Par ailleurs, quelque cent cinquante participants étaient présents à cette réunion, dont les représentants des délégations des Etats membres de l’UNESCO et d’organisations internationales techniques telles que l’ICCROM, l’ICOM, l’ICOMOS, INTERPOL, l’ICA, l’IFLA, le Bouclier Bleu et l’ICTM. Les instituts et associations du patrimoine étaient représentés par le Getty Conservation Institute, l’Institut national du Patrimoine (France), l’Institut du patrimoine culturel de l’Université Laval (Canada), le CRAterre-ENSAG (France) et l’EPA (Bénin). Les institutions muséales étaient représentées par le Musée du Quai Branly (France), le Smithsonian Institution (USA), le Musée d’ethnographie de Genève et le Israel Museum (Jerusalem). Les institutions techniques publiques étaient quant à elles représentées par l’OCBC (France), l’Agence universitaire de la Francophonie, le Ministère de la culture (France) et la Mission interministérielle pour la reconstruction d’Haïti (France). La liste des participants est disponible sur demande au Secrétariat. 3. L’objet de cette réunion était, dans un premier temps, d’écouter les autorités haïtiennes afin de connaître leurs besoins et leurs attentes vis-à-vis de l’UNESCO dans le cadre de la protection et de la sauvegarde de la culture haïtienne dans toutes ses composantes. Il s’agissait ensuite de définir des modalités d’action qui permettraient à l’UNESCO et ses partenaires de préparer et rendre opérationnel un programme d’ensemble en faveur de la culture haïtienne en tirant parti des vastes capacités de la communauté culturelle de ce pays, qui a déjà mobilisé ses efforts, et en faisant également appel aux experts de renommée mondiale. A cette fin, la première partie de la réunion a été consacrée à un état des lieux des dommages et des besoins tandis qu’en seconde partie de journée, une stratégie intégrée de coopération culturelle à court et moyen terme a été examinée. De plus, afin de coordonner l’action internationale de reconstruction d’Haïti dans le domaine de la culture et assurer sa cohérence, l’UNESCO a proposé que le programme de réhabilitation soit structuré au sein d’un Comité international de coordination (CIC) pour la sauvegarde de la culture haïtienne. II. Ouverture de la réunion 4. La Directrice générale, Mme Irina Bokova, a ouvert la réunion en remerciant les autorités haïtiennes qui se déplaçaient pour la première fois hors d’Haïti depuis le tremblement de terre et en leur rappelant à quel point l’UNESCO était désireuse de leur apporter son aide «dans les domaines de cette culture qui constitue la force et l’âme du peuple haïtien». Des remerciements ont également été adressés aux experts, représentants d’institutions gouvernementales et non gouvernementales, de musées et d’associations culturelles qui avaient eux aussi répondu à l’invitation. Mme Bokova a ensuite rappelé les actions entreprises par l’Organisation dès la première heure et notamment l’établissement d’une cellule de crise, l’envoi de missions sur place, le lancement de projets concernant les services éducatifs, la mobilisation de la communauté internationale afin d’écarter tout danger de pillage, l’appel à la MINUSTAH afin d’assurer la protection des sites et musées emblématiques du pays et la campagne visant à l’interdiction internationale temporaire du commerce d’œuvres d’art haïtiennes. La Directrice générale a également rappelé les divers partenariats de l’UNESCO avec d’autres organisations telles que l’ICOMOS et l’ICCROM qui ont déjà porté leurs fruits à Haïti et a souligné à quel point une cohérence d’action était nécessaire afin d’encourager tous ceux qui le souhaitent à porter assistance au peuple haïtien. 5. Après avoir demandé une minute de recueillement à l’assemblée au nom des nombreuses victimes du tremblement de terre du 12 janvier, Mme Marie-Laurence Jocelyn Lassegue, Ministre de la culture et de la communication de la république d’Haïti a rappelé qu’au-delà de la catastrophe humanitaire (230.000 morts et un demi-million de déplacés), la culture haïtienne avait elle aussi été fortement touchée. Des centres historiques d’une grande importance tels que Port-au-Prince, Jacmel et Léogane sont sous les décombres. Des symboles forts de l’architecture et de la vie artistique sont détruits, plus de cent ans d’architecture sont morts, le berceau de la culture haïtienne est perdu. Les archives, le théâtre, les bibliothèques, tous les outils majeurs de véhicule de la culture sont à présent en grande difficulté. Aujourd’hui, l’ensemble du dispositif de production et de gestion du secteur culturel haïtien souffre d’un déficit de fonctionnement. Par conséquent, il faut souligner combien le peuple haïtien a besoin de solidarité de la part de la communauté internationale et combien l’appui de l’UNESCO lui est indispensable. III. Première séance - Etats des lieux après le séisme 6. Les discussions ont, dans un premier temps, été concentrées sur l’évaluation des dégâts causés par le tremblement de terre, aussi bien sur le bâti que sur le patrimoine immatériel et les industries culturelles. Elles ont été consacrées, dans un deuxième temps, à un débat plus général. III.1. Intervention par le représentant d’Haïti (ISPAN) 7. M. Daniel Elie, Directeur de l’Institut de sauvegarde du Patrimoine national (ISPAN) a présenté la situation actuelle à Haïti principalement du point de vue du patrimoine bâti. Port-au-Prince a été très durement touché car, nonobstant le fait qu’aucun inventaire précis des dommages causés aux bâtiments historiques n’a été fait, il est déjà certain que 75 à 85% du patrimoine historique est sévèrement endommagé. Des listes partielles de bâtiments touchés (ministères, bibliothèques, églises, anciennes fortifications, etc) sont en cours. Les cas de Jacmel et de Léogane ont également été présentés. Le danger actuel de ces villes touchées par le séisme consiste en la destruction sauvage au bulldozer des édifices endommagés. M. Elie a conclu son allocution en rappelant les diverses actions que menait l’ISPAN avant le séisme ainsi que sa collaboration avec le Centre du patrimoine mondial. III.2. Interventions des institutions partenaires de l’UNESCO 8. M. Araoz, Président du Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS) a, dans un premier temps, rappelé les missions de l’ICOMOS et notamment son travail dans la protection du patrimoine matériel. Suite au tremblement de terre qui a secoué Haïti, l’ICOMOS a réagi immédiatement et a exprimé la nécessité d’une coordination de l’aide apportée aux autorités haïtiennes. L’ensemble des ressources de l’ICOMOS a été mobilisé et à cette fin, un comité d’experts a été créé. Début février, des missions ont été dépêchées sur place en collaboration avec l’ISPAN, l’UNESCO et WMF. L’ICOMOS a reçu bon nombre d’offres d’aide notamment des universités et des instituts du patrimoine. Une base de données de plus de deux cents volontaires est tenue à jour. 9. M. Anfruns, Directeur général du Conseil international des musées (ICOM) a, lors de son intervention, insisté sur les actions sur place, les activités au niveau international et la coordination. Concernant les actions sur place, une cellule de crise ‘Patrimoine en danger’ a été constituée afin de faire un inventaire partiel des sites en danger (à savoir une dizaine de musées et une trentaine d’institutions culturelles) et dresser une première liste d’actions d’urgence. Du point de vue international, la lutte contre le trafic illicite des biens culturels est une priorité de l’ICOM qui salue l’appel à l’interdiction temporaire du commerce des œuvres d’art lancé par l’UNESCO. De plus, l’ICOM va prochainement publier une Liste rouge consacrée aux objets culturels haïtiens en péril et mettre en place une page web par institution touchée avec localisation GIS, projets de reconstruction, etc. Enfin, M. Anfruns a rappelé que la coordination entre les acteurs de terrain sur place est primordiale et que l’action du Bouclier Bleu est importante dans ce domaine. 10. Pour M. Sanz, Président du Comité français de la Fédération internationale des associations de bibliothécaires et d’institutions (IFLA), la priorité est d’identifier les acteurs et les besoins nécessaires pour Haïti. Récemment, l’IFLA a élaboré un programme d’action dont elle propose à ses membres de s’inspirer pour leurs propres actions. Ce programme d’action est structuré en trois phases. La première, la phase d’urgence, se compose d’actions telles que la sécurisation des bibliothèques, le sauvetage des collections qui peuvent encore l’être, l’identification de lieux de stockage, etc. La seconde phase, à moyen terme (environ deux mois), prévoit de réaliser des inventaires, d’installer des unités mobiles de traitement d’urgence, de former le personnel sur place à la restauration, d’identifier si cela s’avère nécessaire des ateliers de restauration spécialisés à l’étranger et de commencer la reconstruction du réseau de bibliothèques. Enfin, la troisième et dernière phase (de deux à dix ans) comporte les projets de construction de bâtiments antisismiques, de création d’une école de sciences de l’information pour former les bibliothécaires haïtiens et la constitution de collections physiques et électroniques. Outre ce programme d’action, l’IFLA collabore également avec plusieurs instances, comités et associations en France (notamment ADIFLORE et ‘Bibliothèques sans frontières’) pour mener des actions telles que la mise à disposition de bâches pour une protection provisoire et le don de livres aux bibliothèques haïtiennes. 11. A son tour, M. Bouchenaki, Directeur général du Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels (ICCROM), a d’abord rappelé les possibilités d’intervention de l’ICCROM face à ce genre de catastrophes, la force de cette organisation trouvant son point d’ancrage dans son réseau et son expérience. Si, d’un point de vue méthodologique, l’ICCROM encourage la conservation préventive, des actions d’urgence ont également été prévues telles que la publication d’un manuel et la création d’un site rassemblant les données disponibles, la collecte d’informations étant considérée comme l’action prioritaire à mener. M. Bouchenaki a cependant mis en garde les acteurs de la reconstruction contre le danger que constituent les actions qui ont pour but de faire face à des situations d’urgence et qui malheureusement à long terme risquent de causer des dégâts. Pour cette raison et se faisant l’écho de ces prédécesseurs à la tribune, le Directeur général de l’ICCROM a rappelé à quel point la coordination entre autorités haïtiennes et coopération internationale était indispensable. M. Bouchenaki a ensuite présenté les actions prioritaires menées par l’ICCROM et a rappelé que son organisation est prête à aider le peuple haïtien dans le cadre d’une mobilisation concertée des organisations internationales sous la conduite des autorités haïtiennes et de l’UNESCO. III.3. Intervention du Directeur du Smithsonian Institution 12. Après avoir entendu les points de vue des organisations internationales, le représentant du Smithsonian Institution, M. Kurin - Under Secretary for History, Art, and Culture - a présenté des propositions d’actions venant d’institutions muséales qui ont également un rôle important à jouer dans la sauvegarde de la culture haïtienne. Plus particulièrement, le Smithsonian Institution a déjà collaboré par le passé avec des artistes haïtiens (coopération avec un comité d’artisans et avec la Galerie d’art Nader). Aujourd’hui, l’institut essaye de recenser et d’identifier les porteurs de tradition orale haïtienne qui sont encore en vie car la pérennité du patrimoine immatériel haïtien est primordiale dans la survie et la reconstruction d’Haïti. Le patrimoine vivant ne doit pas seulement faire l’objet d’un inventaire mais doit également avoir les moyens de perpétuer ses traditions vivantes. M. Kurin a particulièrement insisté sur la nécessité de fournir du matériel, des fonds et des marchés aux artistes haïtiens. Pour y parvenir, le réseau des 160 institutions affiliées au Smithsonian Institution pourrait être d’une grande utilité. M. Kurin a également souhaité que des artistes conteurs, chanteurs, etc. soient présentés à travers le monde pour que soit davantage connue l’identité haïtienne et que cela puisse aussi être une source de reconnaissance et de revenus. Enfin, le directeur du Smithsonian Institution a rappellé que des centaines d’experts et de conservateurs sont prêts à offrir leur aide mais que cela ne sera possible que si les autorités haïtiennes font part de leurs priorités. De plus, M. Kurin a demandé que le gouvernement haïtien prenne position quant à l’attribution ou non d’aides financières publiques à la sauvegarde de collections privées. III.4. Rapport de la mission UNESCO culture à Port-au-Prince (1-7 février 2010) 13. Le représentant spécial de l’UNESCO pour le Secteur de la culture, M. Fernando Brugman, a été envoyé à Port-au-Prince afin de faire un diagnostic préliminaire de l’état de la culture à Haïti. Des photos ont été visionnées illustrant non seulement l’ampleur du désastre mais également, et surtout, la mobilisation de la population sur place qui se bat pour sauver ce qui peut encore l’être. M. Brugman a rappelé que si des actions d’urgence sont nécessaires, il faut prendre garde à ce que les interventions étrangères ne produisent des effets négatifs à long terme sur la culture haïtienne. Pour éviter ce danger, il est indispensable de mobiliser les intellectuels et opérateurs culturels haïtiens. III.5. Discussion générale 14. Suite aux présentations des intervenants officiels, certains participants, notamment des donateurs, ont souhaité s’exprimer sur certains points. Ainsi la représentante de l’Espagne a rappelé que la coopération espagnole s’était fortement engagée et souhaitait renforcer sa contribution, que sa délégation soutiendrait le projet de résolution proposé par l’UNESCO au Conseil de sécurité des Nations Unies contre le trafic d’objets culturels et que des fonds seraient à disposition pour des projets de restauration du patrimoine bâti (en collaboration avec le Centre du patrimoine mondial). Le représentant de la Commission européenne a quant à lui déclaré que des fonds (quelque 600 millions d’euros) étaient actuellement alloués dans une démarche d’aide humanitaire d’urgence. Cependant, reconnaissant que le dialogue sur la reconstruction doit commencer, il a reconnu nécessaire que la culture soit prise en compte dans les efforts qui y sont consacrés. Le représentant du Japon a rappelé que des fonds (70 millions de dollars) et des équipes médicales ont été envoyés à Haïti. 15. La parole a ensuite été prise par la représentante de la République Dominicaine. Celle-ci a rappelé combien le rôle de l’UNESCO était important pour fixer la feuille de route en matière de reconstruction culturelle et éducative et pour définir des stratégies à moyen et long terme. Elle a rappelé à l’audience l’importance du respect de la souveraineté de l’Etat haïtien. La représentante des Etats-Unis d’Amérique a quant à elle souhaité avoir de plus amples informations sur les mesures d’urgence contre le pillage prises par l’UNESCO car il ne semble pas y avoir de signes concrets d’une présence internationale pour sécuriser les sites et empêcher que les biens culturels sortent illicitement d’Haïti. En réponse, Mme Comeau Denis, Conseillère spéciale auprès de la Ministre de la culture et de la communication d’Haïti, a fait savoir que dès le lendemain du séisme des mesures avaient été prises par les Haïtiens eux-mêmes et les autorités haïtiennes afin d’organiser des patrouilles mobiles de surveillance des sites les plus importants. Dans un second temps, un communiqué aux collectionneurs privés a été lancé pour éviter la fuite des œuvres et des surveillances spécifiques ont été mises en place aux frontières. La Sous-Directrice générale pour la culture de l’UNESCO, Mme Françoise Rivière, a informé la réunion que dès le lendemain du séisme, elle avait personnellement sollicité l’aide de la MINUSTAH pour sécuriser certaines collections et qu’une nouvelle demande avait été faite par la Directrice générale puis par le Directeur du bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince, le 3 février, à cet égard. Mme Rivière a également souligné l’important travail et les initiatives prises par les Haïtiens eux-mêmes pour sortir des décombres les œuvres qui pouvaient encore être sauvées. Il est à présent urgent de fournir du matériel et des fonds à ces personnes pour continuer ce travail et mettre en sécurité ces œuvres dans des containers ou autres lieux de stockage identifiés puis procéder à un inventaire le plus exhaustif possible. 16. La représentante du Conseil international des archives (ICA) a, pour sa part, exprimé le souhait de soutenir en priorité les actions de récupération des archives des administrations et des institutions ensevelies sous les décombres afin de permettre la reprise des activités et fonctions de l’Etat. En ce sens, la réponse apportée par le Bouclier Bleu doit être privilégiée. Par la suite, le représentant d’INTERPOL a également fait part des actions de son organisation en faveur du patrimoine culturel haïtien et notamment l’appel fait aux Etats membres concernant les risques potentiels de pillage des objets culturels et la nécessité d’une vigilance accrue en ce domaine. INTERPOL a également créé un point focal qui suit en priorité toutes les questions liées à Haïti. Cependant, il faut noter que, pour le moment, peu d’informations sont disponibles et qu’il est très difficile de rassembler des informations sur les pillages et les vols. Le directeur de l’Institut du patrimoine culturel de l’Université Laval (Canada) a rappelé que les diplômés du Master ‘Mémoire et Histoire’ sont disposés à se rendre sur place si nécessaire et qu’un projet pilote avait, avant le séisme, été mené à Jacmel (un début d’inventaire a été commencé dans le cadre de ce programme). Enfin, le représentant des Pays-Bas a pris la parole au nom du Fonds Prince Claus pour la culture et le développement pour informer la réunion de la préparation d’un inventaire listant douze coopérations prioritaires entre ce Fonds et d’autres institutions. IV. Deuxième séance - Vers une stratégie intégrée de coopération culturelle sur le moyen et long terme IV.I Discussion générale 17. La Sous-Directrice générale pour la culture a relevé que la proposition de l’UNESCO de coordonner l’ensemble des efforts dans le cadre d’une stratégie intégrée de coopération culturelle sur le moyen et le long terme pour Haïti semblait acceptée, en premier lieu par les autorités haïtiennes et par la communauté internationale. Elle a demandé qu’une duplication des efforts soit évitée à tout prix et que chaque contribution budgétaire versée par un pays fasse l’objet d’une affectation précise. Concernant le CIC, Mme Rivière a précisé qu’elle espérait qu’il se tienne le plus tôt possible, peut être courant juin 2009, afin de faire le point de ce qui a été fait, des tâches les plus importantes à réaliser et de l’action internationale à poursuivre. Enfin, la Sous-Directrice générale a tenu à rappeler que le Ministère de la culture d’Haïti a lui-même subi d’importantes pertes humaines et matérielles. A ce titre, le représentant de la délégation interministérielle de la France et du Conseil de l’Europe a souligné le besoin réel en matériel informatique et annoncé que le Conseil lancera un appel à ce sujet à ses 48 Etats membres à l’issue de la réunion. 18. Le Directeur général de l’ICCROM a suggéré que les participants à la réunion recommandent des mesures légales temporaires de protection spéciale du patrimoine culturel. Il a insisté sur l’utilité de la constitution d’une équipe spéciale par les autorités haïtiennes en coordination avec le CIC. Il a enfin déclaré qu’un appel aux volontaires devrait être lancé depuis Haïti et que ceux-ci pourraient bénéficier en retour d’une formation concernant la documentation et les exercices d’évacuation. A ce sujet, Mme Victoire O. L. Adegbidi, représentante de l’Ecole du patrimoine africain a proposé que ses étudiants aillent travailler en Haïti pour bénéficier d’une expérience professionnelle et, selon les fonds disponibles, démarrent cette formation en août ou septembre 2010. 19. Le représentant du Bouclier Bleu, M. Christophe Jacobs, a rappelé que son organisation était active sur le terrain depuis le 13 janvier et qu’elle a pu servir de force de coordination en étant continuellement informée de la situation dans le pays. 500 personnes se sont portées volontaires pour fournir une aide additionnelle, qui ne fasse pas double emploi avec les efforts déjà réalisés ou en cours. Cependant, le Directeur de la Division des objets culturels et du patrimoine immatériel de l’UNESCO a attiré l’attention de l’auditoire sur les critères du partenariat entre Haïti et la communauté internationale ainsi que sur la nécessité d’une législation d’urgence, la création d’une force spéciale haïtienne, l’implication du peuple haïtien et les enjeux logistiques de tout cet effort. 20. La Conseillère spéciale de la Ministre de la culture et de la Communication s’est montrée préoccupée par le fait que les interventions étrangères pourraient affaiblir davantage le gouvernement haïtien et a demandé que le renforcement des structures institutionnelles soit une priorité de l’effort de reconstruction. Tout en remerciant, au nom de son pays, le Bouclier bleu pour son aide, elle a estimé qu’il aurait été préférable que les autorités soient associées au projet de cette organisation dès le départ. 21. Le représentant du Brésil a recommandé que le gouvernement haïtien fasse un appel de fonds dans le cadre de toutes les conventions auxquelles le pays est partie. A ce titre, Mme Rivière a noté qu’Haïti a ratifié les Conventions de 1970, 1972, 2003 et 2005 et que ce pays devrait réclamer l’aide d’urgence disponible. Elle a aussi noté que la Convention de 2005 proposait un fond mais qu’il ne sera pas opérationnel avant décembre 2010. 22. Une consultante présente dans la salle, Mme Florence Alexis, a demandé que la question du partenariat public-privé ne soit pas ignorée, compte tenu de l’activité du secteur public à Haïti et de ses actions passées en faveur du patrimoine de l’île. Mme Alexis a aussi insisté sur l’engagement potentiel de la communauté haïtienne à l’étranger, un réseau doté de nombreuses ressources et qualités. Mme Alexis a par ailleurs suggéré que vu la charge qui pèse actuellement sur le dos de l’Etat, que le dialogue soit plutôt orienté vers la société civile. La Conseillère spéciale de la Ministre, reconnaissant l’importance du dialogue avec la société civile et du partenariat public / privé, a insisté sur le fait qu’il ne s’agit pas pour l’Etat de se décharger de ses responsabilités pour les faire porter par la société civile mais qu’il s’agit au contraire de tout mettre en œuvre pour que l’Etat puisse disposer des moyens pour faire face aux responsabilités qui lui incombent. Elle a ajouté que le tremblement de terre pousse le pays à s’interroger sur ses problèmes systémiques. 23. Le délégué du Pérou a illustré l’effort consenti par son pays qui a envoyé des ressortissants à Haïti pour prêter main forte immédiatement après la catastrophe et participer à une réunion à Quito début février visant à coordonner l’aide sud-américaine. La délégation du Pérou a demandé à la Directrice-générale de mobiliser d’autres secteurs de l’UNESCO comme celui des Sciences sociales et humaines qui a publié un document exemplaire en ligne qui souligne le souhait des autorités haïtiennes de voir les haïtiens eux-mêmes prendre l’initiative. 24. Mme Comeau Denis a insisté sur l’importance de s’assurer que l’action menée sur le terrain ne bénéficie pas uniquement à ceux qui connaissent les rouages de la coopération internationale ou qui ont déjà des relations professionnelles avec les gouvernements étrangers et les organisations internationales. Elle a déclaré que les plus jeunes ont été particulièrement affectés et que les étudiants qui ont survécu pourraient bénéficier de formations aux inventaires et obtenir par là même un salaire. IV.II Actions prioritaires à court et moyen terme IV.II.1. Patrimoine bâti et centres urbains 25. M. Thierry Joffrey, Président de CRAterre-ENSAG, a indiqué que les efforts de reconstruction devaient s’adapter au contexte national et culturel en soulignant que les maisons en bois avaient été épargnées par le séisme. Mme Rivière a estimé qu’il conviendra en priorité de sécuriser les bâtiments principaux, puis de reconstruire les monuments et les sites en fonction du matériel disponible. Lors de ce processus, l’approche se doit d’être novatrice afin d’écarter le risque d’une nouvelle destruction des bâtiments si une nouvelle catastrophe devait se reproduire. 26. La Conseillère spéciale auprès de la Ministre de la Culture et de la Communication a souligné le fait que toutes les mesures visant à la reconstruction devaient être réalisées dans une approche de développement durable. Mme Comeau Denis a également mentionné que les constructeurs eux-mêmes devaient être sensibilisés et formés à la construction parasismique. 27. M. André Delpuech, du Musée Quai Branly, a attiré l’attention de l’audience sur le fait que les problèmes concernant le patrimoine archéologique existaient déjà à l’époque des Tainos. Tout en confirmant que certaines destructions étaient malheureusement inévitables, il a rappelé que de nombreux collègues étaient prêts à offrir leur aide pour sauvegarder les sites. Il a ensuite expliqué qu’Haïti avait certes finalisé plusieurs inventaires de sites archéologiques, mais que peu d’autres inventaires existaient. 28. M. Daniel Elie, Directeur de l’ISPAN, a estimé que l’intervention du gouvernement à Jacmel représenterait la première de ce genre impliquant des holdings privés. La loi stipule que les monuments appartenant aux citoyens peuvent être nationalisés, contre indemnisation au propriétaire. M. Elie a également mentionné qu’une telle action nécessitait d’être abordée avec la plus grande prudence et qu’il n’était pas encore clair comment la tension entre les secteurs privés et public allait être gérée. M Wilhems Edouard, Directeur des Presses Nationales d’Haïti, a commenté le fait que le cadre juridique existant pouvait être utilisé si le champ d’application du décret 1995—protégeant les bâtiments d’importance extrême— était élargi. Cela seulement permettrait, en se référant également à l’Article 15 de la Constitution d’Haïti, de mettre en œuvre de telles mesures. Mme Comeau Denis a expliqué que cette question correspondait à un vide juridique, et ce malgré les efforts d’Haïti de réformer son droit civil et criminel. 29. M. Bouchenaki de l’ICCROM a proposé que des refuges soient construits pour les sans-abris, dans l’esprit de l’architecture vernaculaire. 30. Mme Diss, de la Société Google, a souligné que sa société pouvait aider à établir des cartes et collecter des informations en utilisant la technologie GIS et que la compagnie avait commencé à mettre ce processus en place une semaine après la catastrophe. Selon elle, Google MapMaker pouvait être utilisé pour décrire ce qui se passait dans les plus petits villages et que MyMaps permettait à des organisations et particuliers de former des communautés. Elle a également mentionné que Streetview pouvait être utilisé pour les sites du patrimoine culturel et que ce service avait déjà été mis à la disposition de certaines ONG. IV.II.2 Musées et institutions culturelles 31. Mme Rivière a demandé à ce que des mesures d’urgence soient prises pour sécuriser les bâtiments des musées endommagés afin que les œuvres d’art qu’ils abritent puissent être mis en sécurité à Haïti ou à l’étranger. Selon elle, il était essentiel de faire appel aux musées dans le reste du pays ou à l’étranger, pour le stockage de ces œuvres, mais elle a par ailleurs noté que la question juridique entre les secteurs public et privé devait être auparavant abordée et que dans ce contexte, Haïti avait peut-être besoin de définir ou éclaircir sa position sur la façon de gérer les collections privées. Elle a insisté sur le fait que les efforts visant à stopper le trafic illicite des œuvres d’art devaient s’accélérer, car il était notoire que ce dernier avait tendance à s’amplifier en situation de crise comme celle-ci. Elle a également suggéré qu’une coopération avec INTERPOL soit mise en place et que la population soit sensibilisée, voire formée, au commerce d’antiquité et d’œuvres d’art en mettant l’accent sur la vérification de leur provenance. 32. Le Colonel Giovanni Nistri, représentant des Carabinieri italiens, a indiqué que ceux-ci ont transmis le courrier officiel de l’UNESCO à toutes les divisions dès réception. Il a informé l’audience que les Carabinieri soumettraient leurs propositions lors de la réunion à INTERPOL au début de la semaine prochaine. Il a souligné le fait qu’il était essentiel de dresser un inventaire afin de combattre le trafic illicite, même si cela représentait une tâche laborieuse. Il a mentionné que cela devrait être réalisé avant même que les objets soient déplacés pour être mis en sécurité et que les Carbanieri pouvaient fournir le formulaire extrêmement simple qu’il avait conçu en Iraq. Enfin, il a ajouté qu’il faudrait tout spécialement se concentrer sur les sites de vente sur Internet, ainsi que les relations avec les agences de douanes. 33. Le représentant du Bouclier bleu a mentionné que son organisation a fait intégrer des mises à jours sur les sites Internet et a approuvé la création d’un « poste médical avancé » pour le matériel culturel endommagé, qui serait installé sur un site près de l’aéroport et servirait d’endroit pour stocker et protéger les œuvres d’art et accueillerait et orienterait les volontaires. 34. Le Délégué des Etats Unis a pris la parole au nom du représentant du Smithsonian Institution indiquant que l’institution était prête à coopérer avec le Ministère de la Culture et de la Communication d’Haïti et l’ICCROM pour la restauration des biens culturels et qu’elle souhaitait participer à la formation des Haïtiens dans cette optique. Avec l’autorisation du gouvernement haïtien, le Smithsonian aimerait également participer aux efforts de restauration à grande échelle, comprenant entre autres l’installation d’une grande tente de stockage, tout comme il serait fortement intéressé à participer au CIC. IV.II.3 Patrimoine immatériel et industries culturelles 35. M. Laurier-Turgeon, de l’Université de Laval, Québec, a souligné la richesse exceptionnelle du patrimoine immatériel haïtien, et du rôle très important des carnavals, en particulier du carnaval de Jacmel, qui représente également un marché artisanal important et une source non négligeable pour le tourisme culturel. Cet événement souligne le rapide retour sur investissement que peut procurer une attention au patrimoine immatériel, ainsi que la fonction thérapeutique que peut avoir la culture en cette période traumatique pour le peuple haïtien. M Pierre Buteau, ancien Ministre haïtien de l’éducation, a quant à lui, mis l’accent sur l’importance à accorder aux individus dépositaires de la culture haïtienne, et qu’un inventaire du patrimoine immatériel devrait également être effectué. 36. Quant aux institutions invitées, l’ICCROM a estimé que les artistes devraient également être intégrés dans les efforts de reconstruction, et soutenus pour ce faire par la communauté internationale. Le Smithsonian a déclaré être intéressé de travailler avec l’Université de Laval et le gouvernement haïtien pour conduire un inventaire des ressources culturelles haïtiennes et aider les artistes et les artisans à établir des débouchés commerciaux pour leur travail. 37. Mme Comeau Denis a rappelé que le carnaval de Jacmel rassemble des artisans de tous types qui reçoivent des subventions des municipalités pour leurs produits. Ces subventions ne sont plus disponibles et les ateliers des artisans ont été totalement détruits. Mme Comeau Denis suggère qu’un fonds d’urgence soit établi pour ces artisans et artistes. En ce sens, le délégué du Brésil a estimé en effet que les autorités haïtiennes doivent être soutenues à travers la création d’un tel fonds; bien qu’il soit impossible d’assister chaque artisan individuel, des aides collectives devraient pouvoir être accordées. La représentante de Google a informé l’assistance qu’un outil de recherche sur les personnes a déjà été mis en place, et a suggéré que les artistes puissent promouvoir les divers efforts de Google. 38. Enfin, une représentante de l’ICCROM a estimé que le son, les images animées, et les arts du spectacle devraient également retenir l’attention et faire l’objet de collecte. Mme Rivière a rappelé de nouveau que des Fonds sont disponibles au titre des Convention de 2005 et de 2003, et que la Convention de 2003 peut en particulier débloquer des fonds dans des délais relativement rapides puisque les mécanismes d’octroi sont tout à fait opérationnels. IV.II.4 Archives, bibliothèques et manuscrits 39. A ce sujet, la représentante de Google a proposé que — bien que ce soit une question politiquement sensible — le patrimoine écrit puisse être digitalisé. L’IFLA a soutenu cette proposition mais a demandé que les Haïtiens établissent les priorités par des directives claires. Le représentant de cet organisme a aussi estimé qu’un consensus devrait être rapidement établi afin de sécuriser les musées et les bâtiments abritant des archives, et qu’à plus long terme, les institutions haïtiennes elles-mêmes devraient être renforcées. Dans le moyen terme, il a proposé que des services de lectures soient mis à la disposition du million et demi de réfugiés à travers des bibliobus. 40. Enfin, M. Pierre Buteau a estimé que le Comité du programme “Mémoire du monde” de l’UNESCO devrait jouer un rôle à cet égard. V. Conclusions et clôture 41. Avant de lever la séance, Mme Riviere a salué la participation à la Réunion préparatoire de la délégation haïtienne et de près de 150 personnes issues de 50 délégations, 11 OIG et ONG et 20 institutions nationales. Elle a précisé que le rapport serait adressé au préalable aux autorités haïtiennes pour approbation et ensuite envoyé aux participants. 42. La Sous-Directrice générale pour la culture a synthétisé les points cruciaux de la réunion en rappelant que les autorités haïtiennes devront préparer une feuille de route avec les urgences par priorité, en fonction desquelles le CIC établira ensuite ses priorités. La création de cet organe devra être approuvée par le Conseil exécutif de l’UNESCO qui se réunira du 30 mars au 15 avril 2010. Il ne pourra donc se réunir qu’après cette date, la fonction étant de coordonner l’action de la communauté internationale à la lumière des priorités établies par les Haïtiens eux-mêmes, d’éviter les doubles emplois et de mobiliser la volonté politique et le soutien financier au service de ces priorités. Il ne pourra donc s’agir que de priorités à court et moyen terme. Mais d’ores et déjà, un certain nombre d’urgences s’imposent, auxquelles il faudra faire face, et que Mme Rivière s’est employée à résumer : 1) le soutien au Ministère de la culture ; 2) la sécurisation des sites culturels majeurs à Port-au-Prince et dans les villes touchées par le tremblement de terre (Jacmel et Léogane principalement) ; si la MINUSTAH ne donne pas suite aux appels répétés qui lui ont été adressés, il sera demandé aux autorités haïtiennes de charger des volontaires (USA ?, Bouclier Bleu ?) d’agir à cet effet ; 3) la collecte et la mise à l’abri des objets culturels, des archives, des livres, etc. ainsi que la consolidation des structures, la mise à disposition de containers, le paiement de la main d’œuvre ; 4) l’élaboration de mesures juridiques d’urgence pour protéger les biens haïtiens contre les ‘destructions sauvages’ ; 5) la réalisation ‘d’inventaires d’urgence’ par les Haïtiens eux-mêmes (sites à sécuriser, archives et documents à recenser, traditions immatérielles à répertorier) ; 6) la création d’un fonds (mécanismes d’affectation des ressources, propositions à la communauté internationale) pour financer les artistes et artisans haïtiens qui ont perdu leur capital dans le tremblement de terre. 43. Le mot de conclusion est revenu à Mme Comeau-Denis qui a souligné que la Réunion préparatoire a posé le cadre de différentes actions auxquelles les autorités haïtiennes vont ajouter d’autres sujets qui n’ont pas été discutés en raison du temps imparti. Mme Comeau Denis a remercié chaleureusement les participants et présenté ses condoléances aux pays qui ont perdu des ressortissants dans la catastrophe. Enfin, elle a conclu en insistant sur l’isolement ressenti par la Ministre et son équipe et sur la difficulté à convaincre de l’importance de la culture en pareilles circonstances. ANNEXE RECOMMANDATIONS A l’invitation de l’UNESCO, une délégation haïtienne, conduite par la Ministre de la culture et de la communication, Mme Marie-Laurence Jocelyn Lassègue, a participé à une réunion informelle, le 16 février dernier, pour discuter des actions à entreprendre, dans l’urgence comme sur le moyen terme, en vue d’aider à la sauvegarde de la culture haïtienne, suite au séisme du 12 janvier dernier. Il est à souligner que toute action de reconstruction devra se fonder sur la culture haïtienne comme ciment du lien social. La culture, dans toutes ses composantes, permet au peuple haïtien de retrouver ses repères et de concevoir son avenir. S’appuyant sur la créativité du peuple haïtien qui s’exprime à travers le cinéma, la littérature, la musique, les arts, l’artisanat et toutes les manifestations porteuses des valeurs culturelles d’Haïti, l’action internationale devra apporter un soutien ferme et dynamique à la création ainsi qu’à la reconstitution des structures de formation, transmission, production et diffusion des expressions culturelles haïtiennes. Dans ce contexte, l’importance du patrimoine immatériel est à rappeler car il constitue un repère fort et vivant face à l’ampleur des destructions matérielles et sa transmission doit être réactivée par des actions ciblées à court terme, à l’intention notamment de la jeunesse, telles que le Carnaval de Jacmel. Par ailleurs, les œuvres d’art et objets culturels haïtiens, reconnus comme ayant une valeur inestimable pour l’identité haïtienne et la communauté internationale, sont aujourd’hui en immense danger face aux pillages potentiels et à une dégradation irréversible et doivent bénéficier d’une aide technique d’urgence tant en ce qui concerne leur sécurisation, leur conservation, que leur restauration et la prévention de leur trafic illicite. Le patrimoine bâti, en particulier les édifices abritant les institutions gouvernementales, les édifices religieux, les habitations historiques, constituant une empreinte culturelle et historique fondamentale à l’identité haïtienne, appelle une action d’urgence afin de prévenir les destructions sauvages et de consolider les structures pertinentes existantes, y compris en veillant à la sauvegarde des biens culturels abrités par ces édifices. Il est enfin à noter que le patrimoine écrit haïtien, notamment ses bibliothèques et archives nationales qui constituent la mémoire historique individuelle et collective de la nation haïtienne, doit être sauvegardé pour les générations futures, notamment par des actions visant d’une part à la sécurisation et au stockage des documents menacés de dispersion et de destruction et, d’autre part, à la numérisation de ce patrimoine. La Ministre de la culture et de la communication en appelle à la Directrice générale de l’UNESCO pour la mise en place immédiate d’un Comité de coordination internationale pour la sauvegarde de la culture haïtienne, chargé de veiller, sous l’égide de l’UNESCO, à la coordination et au suivi de la mise en œuvre des actions des différents partenaires internationaux, à court, moyen et long terme, selon le schéma ci-dessous. Madame Comeau Denis a fait valoir que la liste des actions énumérées ci-après n’est pas exhaustive et pourra être complétée dans le cadre de rencontres de travail spécifiques, dans la mesure où le temps imparti n’a pas permis de poser l’ensemble des problèmes. Patrimoine bâti et centres urbains - Actions d’urgence : • Identification précise des sites touchés pour les protéger contre des démolitions sauvages, notamment grâce au recours aux images satellite ou à une cartographie détaillée (type ‘Google’) • Établissement d’une base de données commune et accessible par tous sur les dommages et les besoins (inventaires pluridisciplinaires) • Renforcement provisoire des bâtiments à risque et sécurisation des bâtiments les plus importants • Mise en place d’une méthodologie d’évaluation des structures et sites endommagés - Actions à moyen terme : • Formation du personnel haïtien/volontaires locaux (applicable à tout domaine) • Reconstruction de certains ensembles en utilisant des matériaux traditionnels et en prenant en compte les spécificités du terrain et les risques naturels • Etablissement d’inventaires des sites (y compris archéologiques) et monuments à placer sous protection de l’Etat haïtien Musées et institutions culturelles - Actions d’urgence : • Établissement d’inventaires d’urgence des collections délocalisées (photos, fiches simplifiées, étiquettes) • Préparation d’un inventaire aussi complet que possible des institutions et de leurs collections pouvant faire l’objet de pillage et sécurisation de celles-ci en coopération avec les autorités haïtiennes, la MINUSTAH et d’éventuels autres volontaires • Renforcement de la coopération en matière de lutte contre le pillage et le trafic illicite de biens culturels (ICOM, OMD, INTERPOL, MINUSTAH) • Préparation d’une Liste Rouge de catégories de biens particulièrement menacés de pillage (ICOM) • Mise à disposition de ressources et de matériel d’urgence (containers, véhicules, etc) au personnel haïtien s’efforçant de sécuriser les collections pour lui permettre de continuer ce travail • Identification de lieux de stockage potentiels pour la conservation temporaire des collections et permettre leur inventaire d’urgence • Clarification de la position de l’Etat haïtien vis-à-vis des moyens à consacrer à la sauvegarde des collections privées - Actions à moyen terme : • Sensibilisation des clients du marché d’art aux risques de trafic illicite y compris par Internet • Restauration des objets endommagés dans un laboratoire situé dans le pays et avec des experts haïtiens Patrimoine immatériel - Actions d’urgence : • Recensement des porteurs de traditions immatérielles et des agents de transmission • Mise à disposition de ressources, matériaux, instruments etc. afin de permettre la continuité de l’expression des traditions immatérielles et de soigner les ‘blessures de l’âme’ - Actions à moyen terme : • Facilitation de l’organisation de spectacles de conteurs, musiciens, poètes etc. à Haïti et en dehors d’Haïti • Donner au carnaval de Jacmel les moyens de s’organiser à nouveau Archives, bibliothèques et manuscrits - Actions d’urgence : • Sécurisation des bibliothèques et identification de lieux de stockage afin d’y transférer les collections qui peuvent être sauvées • Inventorisation et évaluation des collections transférées et identification des traitements nécessaires • Organisation d’unités mobiles de traitement d’urgence • Desservir les populations des camps de Port-au-Prince avec des bibliobus - Actions à moyen terme : • Identification d’ateliers de restauration à l’étranger, et transfert, si nécessaire et en dernier recours, des biens devant y être traités • Formation de restaurateurs locaux pour la conservation à long terme • Démarrer la numérisation des contenus des bibliothèques d’Haïti Industries créatives - Actions d’urgence : • Recensement des associations d’artisans • Assurer l’accès aux matières premières • Création d’un fonds d’urgence pour les artisans et artistes - Actions à moyen terme : • Reconstruction de la chaîne depuis la création, production, valorisation, promotion et commercialisation de l’artisanat • Élaboration d’une stratégie pour consolider les marchés existants et accéder au marché international en : - renforçant les structures publiques et privées et les organisations professionnelles - utilisant les nouvelles technologies pour maximiser l’impact des réseaux Coordination et points généraux - Actions d’urgence : • Coordination par le Ministère de la Culture des institutions publiques qui doivent définir les axes prioritaires en matière de reconstruction culturelle (constitution d’une ‘Task Force’) • Doter les institutions culturelles d’un moyen minimal de fonctionnement • Envisager la mise en place de mesures juridiques temporaires et exceptionnelles qui permettraient de protéger le patrimoine à Haïti, y compris le patrimoine privé (selon la délégation haïtienne, le cadre légal existant peut être utilisé pour étendre la protection de l’Etat au-delà du patrimoine public dans l’immédiat sur la base de l’article 15 de la Constitution et le décret du 23 août 1995) • Tout appui doit s’inscrire dans le cadre du renforcement des capacités nationales, et dans celui d’une perspective à moyen et long terme. - Actions à moyen terme : • Identification d’un point focal «Créativité – artisanat » pour élaborer des projets/programmes répondant aux besoins identifiés par les parties prenantes qui seront soumis aux donateurs • Mise en place d’une équipe spéciale d’experts haïtiens qui pourrait travailler avec le CIC

Vendredi 5 Mars 2010
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